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Une journée sur l'AlterTour


 

Publié le 01/08/2014

journée du mercredi 30 juillet

Il était une fois une joyeuse bande bigarrée de cyclistes un peu fous qui, de village en village, allaient cahin cahant, quérir chaleur humaine, joie, bonnes ripailles et belles utopies.

Notre récit commence en cette humide journée du mercredi 30 juillet de l’an de grâce 2014, au lieu dit La Borie sur la commune de Pierrefitte.

Notre fière équipée se réveillant au son enchanteur de la clarinette de Baptiste. Les plus courageux sont déjà affairés aux fourneaux, préparant pour leurs camarades les moins mâtinaux de quoi réveiller leurs ardeurs et tenir toutes les épreuves du jour. Petit à petit, on voit dans un frémissement, les tentes reprendre vie, respirant d’abord lentement, avant de faire jaillir de leurs ventres tièdes des personnages hirsutes aux yeux encore collés. Ces grands enfants, à peine nés, démontent méthodiquement, par des gestes automatiques maintes fois répétés, l’antre moite qui les a abrités.

Alors, le campement prend vie. Une table où trônent deux cafetières bleues émaillées d’autrefois, brûlantes de thé et de café qui n’en a jamais tout à fait la saveur, entourées de moult victuailles : céréales, galettes de riz, pain frais, crème d’amandes, de carouba noisettes, sésame, tout cela pour réveiller définitivement les papilles des plus endormis. Les uns profitent d’un moment de quiétude, d’autres font leur yoga matinal, on retrouve aussi les copains quittés la veille à une heure parfois fort matinale…et les chargés de vaisselle sont déjà à l’ouvrage, organisés autour de divers bacs, savonneux et fumeux. Mais le maître du temps est strict et formel : plus que 10 minutes pour enfourner les tartines dans les bouches à l’haleine encore pâteuse du sommeil, et plus que 5 pour se délester dans les toilettes sèches. Bientôt le briefing de la journée donnera le tempo à suivre, on rappellera les consignes de sécurité indispensables pour circuler en si grand nombre.

Bien entendu, comme à l’accoutumée, nous sommes en retard… Un tel a perdu sa gourde, un autre a oublié de réserver un vélo, doit faire un réglage de frein ou de dérailleur. Et puis, il y a les émouvants câlins d’adieux collectifs, parfumés de toutes les phéromones affectives, célébrant comme il se doit le départ de ceux avec qui tant de fous rires et de quinoa ont été partagés. Aujourd’hui, c’est Léa la bienveillante, Candice et sa bonne humeur communicante, et l’enthousiasme débordant de Manu que l’on voit s’en aller. On se serre, on s’embrasse, on s’échange mail et téléphone, on s’invite mutuellement. Fini les « au revoir », les premiers sont déjà partis, et les serre-joints (heu, serre-file!!) s’impatientent.

Heureusement, reprendre la route nous donne du baume au coeur. Sur nos destriers roulants, nous nous sentons pousser des ailes, chevauchant nos pégases, on oublie fatigue et petits désagréments. Seuls nos ischions endoloris, nous rappellent les kilomètres avalés la veille. Alors, on s’abandonne à l’énergie du groupe, portés par la joie d’être libres. Les paysages défilent assez lentement pour en apprécier toutes les saveurs. Des collines verdoyantes, petits chemins s’enfonçant dans la forêt, talus bordés de mûriers, fougères et bruyères. Ici la Nature est prolixe, les pommiers quadrillent les vergers, châtaigniers et noyers égrainent le paysage. Il ne faut pas se perdre dans ce dédale naturel, certes merveilleux mais ô combien cruel, alors nous laissons libre cours à nos instincts d’acrobates pour flécher les directions et assurer le bon cheminement de chacun.

On traverse des petits villages charmants, aux maisons en pierre, petite place fleurie et ponts séculaires. Des jardiniers aux airs bonhommes nous saluent ou nous taquinent avec de larges sourires, auxquels nous répondons de klaxons et « pouets" guillerets. Les badauds qui flânent nous observent avec curiosité, intrigués par notre flux de vélos aux fanions bigarrés et militants. Et nous faisons des émules! certains nous promettent de rejoindre notre aventure l’an prochain! (plus on est de fous….moins les organisateurs rient!)

Et c’est ainsi, que cheminant, sur une bonne cinquantaine de kilomètres, toujours dans la bonne humeur, malgré les aléas météo, les dérailleurs qui grincent, les crevaisons et les petits bobos, notre joyeuse équipée atteint la ravissante bourgade d’Eymoutiers, où l’attend mille et une surprises. Nous sommes, en effet, accueillis fort sympathiquement par Jocelyne, agricultrice reconvertie qui a monté un « Café des enfants » , par Isabelle salariée de la ressourcerie « Le monde allant vers » ainsi que Charlotte et Laetitia qui ont créé l’épicerie ambulante « au temps des cerises ».

Mais n’allez pas croire pour autant, que nous sommes passés à côtés des autres douceurs de la ville : sur notre passage, boulangerie et autres glaciers ont été dévalisés par notre gourmandise.
Attention mesdames et messieurs, dans un instant, nous allons vous transmettre les témoignages avisés de nos camarades les plus téméraires concernant nos trois découvertes du jour.

 

« Au temps des cerises », Epicerie ambulante et itinérante.
Nadjejda à propos de l’épicerie en 2 mots : convivial et vivifiant.
- Quel est le but de ce lieu ?
Rendre accessible des produits de qualité à un public isolé en milieu rural.
-Qu’est ce qui t’a marquée?
la gérante travaille de chez elle, ou bien directement en contact avec les habitants. Elle livre jusqu’à 50 km à la ronde, ce qui lui permet d’économiser du temps de trajet et de garder une grande qualité de vie dans son travail.

 

« le Café des enfants »
Sandrine à propos du café en 3 mots : lien social, convivialité et créativité
- Expliquez nous ce que c’est : une structure, en lien avec d’autres associations locales, qui permet de faire se rencontrer les enfants et les parents, pour qu’ils puissent discuter de leur rôle de parents, avec un espace de jeux adapté pour les enfants.
Des activités variées leur sont proposées, des jeux de société, des ateliers créatifs en lien avec la nature, organisation d’évènement tels que Eymoutiers-plage. Nous avons pu observer l’atelier dentelle sur feuille par exemple.
- Point positif : c’est une bonne alternative, ce n’est pas une structure sociale pro-éducation, mais un vrai lieu de sociabilité spontané pour tous.

 

« Le Monde Allant Vers » ressourcerie, anti-gaspi !
Récupération, tri recyclage, atelier de retransformation et rénovation des objets, vente, sensibilisation.

Pour Sylvia, en 3 mots c’est : association, coopérative, recyclage.
-Que se passe-t-il dans ce lieu ?
un lieu et un point de rencontre, de passage des gens et des objets.
-Ce qui t’a le plus marqué?
c’est un vrai fonctionnement associatif, notamment parce que les décisions sont prises par les salariés qui ensuite en réfèrent au conseil d’administration.
Ils avancent de manière simple évidente et équilibrée.
Et selon Tom, en 3 Mots la ressourcerie c’est : valorisation, une affaire qui roule, bien organisée.
Selon lui, c’est un endroit où l’on récupère des objets vus comme des déchets, et qui sont remis en circulation dans le système.
Ce qui l’a le plus marqué c’est que cette association arrive à employer 6 personnes.

 

Après ces riches découvertes, nous avons ré-enfourché nos montures et gravi l’ultime côte, et non des moindres, pour atteindre le camping verdoyant d’Eymoutiers : comme tous les soirs notre repos se mérite !
Mais pourquoi diable, tous nos lieux de campements sont-ils si haut perchés ?

 

Le maître du temps reprend son rôle avec une certaine rigueur, et bat la mesure des tâches nécessaires : vidage du camion, montage des tentes, lessive rudimentaire, étendage du linge mouillé proche du moisi, attente patiente et joyeuse dans la queue des douches, dans l’espoir de pouvoir, si notre chef d’orchestre le permet, se décrasser sous une douche bouillante. Les plus chanceux trouvent quelques précieuses minutes pour se détendre à l’ombre d’un arbre, faisant fi de l’agitation générale. Plus que 5 minutes avant le départ, ici on finit de poser une chaussette sur un fil, là on se réveille avec peine. Ca y est on est repartis, car ce soir nous sommes attendus pour d’autres animations dans le centre-ville. Un coup de pédale suffit amplement pour redescendre.

Ce soir sous la halle d’Eymoutiers nos hôtes nous attendent. Ils vont exceptionnellement pouvoir assister au briefing du soir, rendez-vous rythmant la fin de nos journées, et permettant le bon fonctionnement du groupe en autogestion. On se répartit les différentes tâches : repas, vaisselles, réparation et répartition des vélos, maître du temps bien sûr, réveil matin (en musique si possible ! ) alter-journalistes (vos serviteurs ! ), rangement, pilotes, co-pilotes des camions, et accueil des nouveaux. Cathy, du café des enfants a organisé avec les habitants d’Eymoutiers, un véritable festin, avec de la viande! Ils nous ont préparé un succulent poulet aux olives accompagné d’un bon verre de vin et pour finir une farandole de clafoutis cerises ou abricots, visiblement faits maison vue leur diversité de forme, taille ou consistance.

Pour clore ces festivités, un artiste local, Sylvestre, dans une pyrotechnie maîtrisée, nous a offert un spectacle très engagé sur la place de l’homme dans un monde dominé par les inégalités, les injustices sociales, en résistance face à l’absurdité de la sur-consommation. Encore une belle rencontre. Mais il est temps de remonter au campement, dernière épreuve physique avant un repos bien mérité. Quelques uns, emportés par l’élan de la soirée et refusant de la voir se terminer, vont définitivement s’achever autour d’une liqueur de châtaigne, au fameux Potron-Minet, petit bar de la vieille ville. Fidèles à eux mêmes, ils échangeront éclats de rires et plein d’idées pour refaire le monde. En rentrant, légèrement éméchés, têtes levées vers le ciel étoilé, il faudra veiller à ne pas réveiller les copains dont on peut déjà entendre les ronflements…

 

Sophie et Vincent

 

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