Atteinte à la Propriété Privée :

Au procès des faucheurs d’OGM, c'est peut-être "celui qui le dit qui y est."


  
Au récent procès de Clermont-Ferrand, la défense posait pour la première fois et avec le soutien d’experts scientifiques, la question des vraies responsabilités. "Qui est la première victime ?" interrogeait l’un des avocats.

Dans cette affaire, les accusateurs seraient-ils en réalité les premiers agresseurs ?

De la cours de récré à la cours du tribunal correctionnel

"C'est c'ui qui dit qui y est !" répond l'enfant à celui qui l'accuse injustement. Pour l'enfant qui subit une attaque verbale, cette réponse procède plus d'un réflexe que d'une réelle analyse de la situation. "Puisque tu me maltraites, je te renvoie la même injure. J'ignore en réalité si ce dont tu m'accuses s'applique vraiment à toi, mais il faut bien que je réagisse". Lorsque l'enfant grandira, il rencontrera certainement d'autres accusateurs. Heureusement, ses capacités d'analyse se seront améliorées, et il comprendra mieux les desseins de ceux qui mettent en cause son comportement.

Une fois adulte et honnête citoyen, on le retrouve adhérant à la cause des Faucheurs Volontaires, prenant le risque d'agir de manière illégale, mais surtout non-violente.

« Projection de mobile » contre « motivation réelle »

Au tribunal de Clermont-Ferrand, ce vendredi 15 septembre 2005, le seul fait objectif sur lequel repose l'accusation, c'est la destruction de plantes transgéniques.

L'interprétation qui en est faite par les plaignants Meristem-Therapeutics et Limagrain, avec le soutien de la loi, c'est qu'il s'agit d'une agression portant atteinte à la propriété privée.

Cependant, en se référant au mécanisme psychologique dit de projection, on est tenté de penser que ce groupe industriel pourrait attribuer aux Faucheurs Volontaires (FV) ses propres traits et impulsions, ceux qu'il refuse de reconnaître en lui-même. Le groupe accuserait ainsi les FV de pensées présumées, qui sont en réalité les siennes…

En imposant une pratique de culture en plein champ aux risques avérés, ce groupe semble en effet manifester une conduite agressive et méprisante vis-à-vis des arrêtés municipaux et régionaux. En menaçant de pollution génétique les multiples bactéries présentes dans le sol, elles même susceptibles de contaminer d'autres organismes, ce groupe porte atteinte aux propriétés privées environnantes, et constitue une menace pour la santé publique. Le biologiste Christian Vélot fournit dans son témoignage les preuves d'une telle "contamination horizontale", largement négligée par le groupe industriel. Enfin, l'intérêt financier constitue un mobile puissant pour l'entreprise privée dominée par ses actionnaires. Parmi les options permettant de produire par trangénèse un médicament (la lipase gastrique), c’est la solution la moins coûteuse qui a été choisie ; moins coûteuse pour le groupe industriel ; pas pour l'environnement, ni pour la santé publique. Preuve en est le refus de couvrir les risques, exprimé par les compagnies d'assurances.

L’intérêt personnel d’être utile aux autres

Une interprétation opposée des faits serait qu'ils procèdent d'une conduite humanitaire et désintéressée, qui bénéficie au plus grand nombre. Dans sa plaidoirie, Me Etelin insista sur cette différence fondamentale avec les habituels comparants en correctionnelle : le désintéressement des Faucheurs Volontaires. Pourtant, les avocats ont oublié que ces derniers trouvent dans leur action une forme d'intérêt personnel, soutenu par une motivation réelle : la satisfaction de la cohérence entre la pensée et l'action, alliée à celle de participer à une grande cause en défendant la population contre la politique négligente de certains intérêts privés.

 "La loi d'un groupe ne peut l'emporter sur la loi de tous" affirmait le Procureur de la République en désignant le groupe des Faucheurs. Cette assertion sera reprise par Me Roux dans sa plaidoirie, mais en inversant les rôles, la même affirmation pouvant tout aussi bien s'appliquer au groupe industriel, à savoir celui qui accuse, "celui qui dit".

 

Un exemple d’atteinte à la propriété privée

Une entreprise s'installe à proximité d'un lotissement. Au moyen de haut-parleurs, elle diffuse nuit et jour des messages de propagande, susceptibles d'influencer les habitants voisins. Nul doute que le comportement de l'entreprise provoque un "trouble de jouissance" des Propriétés Privées environnantes, même si elle prétend que la portée de ses haut-parleurs est limitée. Si aucune loi n'existait pour régler ce trouble de voisinage, il est probable que les habitants du lieu décideraient d'aller décrocher les haut-parleurs.

L'analogie avec la pollution génétique reste limitée, car un champ d'OGM est silencieux. Mais cette pollution discrète n’en existe pas moins.

Ses effets sont irréversibles, ou, au mieux, imprévisibles.

(d’après http://altercampagne.free.fr, 2004)